Témoignage
Décris-nous un peu ton parcours de vie avant d’immigrer au Québec. Où habitais-tu? Quel a été ton parcours scolaire? Quels emplois as-tu occupés?
Je suis née au Chili et j’y ai fait mes études universitaires en journalisme. J’ai d’ailleurs travaillé de nombreuses années dans ce domaine où je me consacrais principalement aux luttes pour les droits de la personne, la protection de l’environnement ainsi que la défense des droits des femmes notamment contre les violences politico-sexuelles de l’état chilien. Puis, à l’âge de 35 ans, j’ai décidé d’émigrer et de m’installer au Québec.
Comment s’est passée ton intégration sur le marché du travail québécois? Quels défis as-tu rencontrés et comment les as-tu surmontés?
Au début, c’était très difficile de m’imaginer dans un milieu de travail sans comprendre encore la culture québécoise, la langue française et les expressions linguistiques particulières au Québec. Un des plus grands défis que j’ai rencontrés a été de réaliser que mes diplômes n’avaient aucune reconnaissance au Canada, notamment au Québec. J’ai dû refaire mon parcours académique afin d’obtenir un baccalauréat de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Une fois mon diplôme en main, la recherche d’emploi était beaucoup plus facile et mon parcours professionnel au Québec pouvait officiellement démarrer.
Quelles différences t’ont les plus surpris·e du milieu professionnel québécois par rapport à celui de ton pays d’origine?
Concernant les différences positives, je suis ravie de constater qu’au Québec les informations personnelles – comme l’âge, le statut (marié·e ou célibataire) ainsi que le fait d’avoir des enfants ou non – ne font pas partie des enjeux décisionnels pour obtenir un poste. Alors que dans mon pays natal, les femmes sont discriminées pour ces raisons lorsqu’elles cherchent un nouvel emploi.
Du côté des différences plus négatives, les préjugés défavorables à l’égard des personnes immigrantes au Québec continuent à être un obstacle, même 15 ans après mon arrivée. Dans mon pays d’origine, je faisais partie des personnes privilégiées, donc je n’étais pas vraiment exposée à ce genre de défis. Ici, il m’arrive de me faire critiquer par rapport à mon accent, ma manière de m’exprimer, sans parler des micro-agressions quotidiennes que je vis, dont les personnes nées au Québec ne sont pas nécessairement conscientes.
As-tu une anecdote amusante à raconter par rapport à ton processus d’immigration ou d’intégration professionnelle?
Le jour où j’ai finalement compris la signification du mot « pantoute » et de l’expression « c’est ça qui est ça ». J’avais passé des années sans comprendre ces expressions! Encore aujourd’hui, ça me fait rire de me rappeler ces moments marquants de mon intégration au Québec.
Qu’est-ce qui t’apporte le plus de fierté dans ton parcours?
Mes études féministes et mes quatre diplômes de l’UQAM. J’ai accompli tout ça au milieu d’un processus de séparation difficile avec mon ex-conjoint, parsemé de violences psychologiques et économiques, en élevant ma magnifique fille qui, à l’époque, n’avait que trois ans. Aujourd’hui, je réalise que j’ai réussi à obtenir de nombreux A+ dans un parcours académique effectué dans une autre langue que ma langue maternelle, en continuant de m’occuper d’un enfant en bas âge et en n’ayant aucun soutien de ma famille restée à l’étranger.
Mais, j’ai réussi à m’en sortir! J’ai élevé ma fille seule tout en m’intégrant sur le marché du travail. Je trouve ça, avec le recul et beaucoup de réflexions, vraiment admirable. Je suis fière de moi!
Quels conseils donnerais-tu à d’autres personnes immigrantes qui cherchent à réussir dans leur carrière ici?
Vous devez développer de la patience, de la tolérance et de la persévérance. Elles sont les clés de la réussite! Il faut comprendre que le parcours d’une femme immigrante peut durer des dizaines d’années avant d’en percevoir les résultats. C’est normal, c’est correct et c’est beau! Ne lâchez pas!
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